Rencontre entre Monsieur Aghatam Ag Alhassane, Premier adjoint au Commissaire au Nord du Mali et les organisations de Rhône-Alpes présentes au Mali
Rappel
La signature du Pacte National le 12 avril 1992 met fin à la guerre au Nord Mali.
Ce pacte, dans son volet institutionnel, prévoit un statut particulier pour les régions du Nord.
Dans un souci d'uniformisation de la politique de décentralisation, l'expérience de la décentralisation au Nord a été appliquée à tout le pays.
Ce statut particulier prévoyait la mise en place d'organes élus, représentant les populations :
Service ou Administration de mission, la Mission de Décentralisation et des Réformes Institutionnelles (MDRI) était d'abord rattachée à la Primature. Elle dépend désormais de la Présidence de la République.
Elle a pour mission de conduire la politique de décentralisation et d'amener le pays vers des élections communales, expression d'une plus grande responsabilisation des populations dans la gestion de leurs affaires.
L'Etat a cherché à former des élites au niveau local afin que les populations soient à même d'assumer ces nouvelles responsabilités.
Dans le cas plus précis du Nord Mali, la mise en place des Collèges transitoires d'Arrondissement (CTA) a facilité l'identification de ces élites.
La MDRI et le Commissariat au Nord ont développé un programme de formation conduit par les équipes mobiles d'appui (EMA) à destination des membres des CTA et des agents de l'administration.
Le nouveau découpage a donné naissance à 701 communes dont 682 sont nouvelles. Les trois régions du Nord Mali comptent 85 communes dont 52 pour la seule région de Tombouctou.
Ce programme de la Mission de décentralisation a été conduit avec des partenaires nationaux et étrangers (notamment la Coopération française et la coopération allemande).
Aujourd'hui, la Loi créant les communes a été votée, et les élections sont prévues pour le 18 avril. Elles se feront de manière séquentielle : il est prévu que deux régions commencent. Les autres suivront afin que tout soit terminé avant le démarrage de la saison des pluies.
La coopération décentralisée, comme moyen de développer la solidarité entre collectivités de pays différents, soit dans un cadre Nord-Sud, soit dans un cadre Sud-Sud, est encouragée par le gouvernement malien, et par la Présidence de la République.
Entre la France et le Mali, cette coopération tire son origine dans les jumelages coopération entre villes et/ou villages.
Les élections en cours prochainement dans les communes doteront le pays d'un cadre institutionnel plus approprié au développement de la coopération décentralisée.
La partie Nord du pays a été secouée par un conflit armé de juin 1990 à avril 1992, date de la signature du Pacte National qui a scellé la paix.
Le Pacte National comporte trois dispositions principales :
Dans le cadre de l'application de la disposition institutionnelle, le Commissariat au Nord a été créé avec pour mission la mise en œuvre du Pacte national. Les démembrements du Commissariat au Nord dans chaque région (les Equipes Mobiles d'Appui) ont travaillé à la réconciliation des communautés et à la sauvegarde de la cohésion qui faisait la force de ces communautés par le passé.
Ces Equipes Mobiles d'Appui ont également permis la mise en place des Collèges Transitoires d'Arrondissement (CTA), assemblées au sein desquelles sont représentées les communautés d'un arrondissement et qui se prononcent sur tout ce qui concerne la vie de leur localité.
Les CTA ont servi de modèle à la mise en place de la décentralisation au Mali.
Depuis leur création, le montage des projets de développement se fait à la base avec la participation directe des bénéficiaires.
Dans chacune des trois régions, l'Equipe Mobile d'Appui, la Mission de décentralisation et des réformes institutionnelles, la DRPS, ont travaillé en concertation avec les populations pour la réalisation des plans opérationnels de développement.
Pour terminer, il convient de rappeler que la normalisation de la situation au Nord est effective et a donné les résultats suivants :
DEBAT
La présentation par Monsieur Aghatam Ag Alhassane du processus de décentralisation en cours au Mali a été suivi d'un débat autour des principaux thèmes suivants :
Les relations entre communes, bailleurs de fonds et ONG
Au Nord la mise en place des communes sera facilitée par l'existence des CTA. La transition devrait se faire naturellement.
La question est plutôt de savoir comment les communes vont discuter avec les porteurs de projets ? Quelle relation va s'établir entre les ONG, les collectivités locales et les bailleurs de fonds ?
Les ONG françaises s'interrogent sur leur place dans le nouveau contexte institutionnel du Mali.
Les conseillers territoriaux d'arrondissement ont suivi une formation pour connaître les compétences des communes, négocier avec leurs partenaires.
Les fonctionnaires de l'Etat tels que les commandants de cercle ont également été formés à leur nouveau rôle.
De leur côté les ONG doivent jouer le jeu de la décentralisation. Le gouvernement malien souhaite et encourage le contact direct entre les ONG et les nouvelles communes, les services déconcentrés de l'Etat (le Gouverneur).
Il est important que tous les partenaires intervenant sur une zone disposent du même niveau d'information.
Le risque de la mise en concurrence des communes entre-elles
Les communes maliennes vont rechercher des partenaires : comment éviter leur mise en concurrence, comment assurer un développement homogène d'un territoire ? Comment favoriser la coopération entre les communes ?
L'Etat malien se trouve actuellement confronté à une contradiction : il a le souci de permettre une répartition équitable des ressources, tout en s'ingérant le moins possible dans les choix de développement des communes.
Au nord, on observe ainsi une concentration des interventions sur Tombouctou (présence conjointe de la Région Rhône-Alpes, de l'US AID, de la GTZ, coopération allemande). Un projet de la coopération américaine prévoyant d'importants financements supplémentaires sur cette région a ainsi conduit les notables de la région voisine de Kidal en délégation à Bamako, pour interpeller l'Etat sur ces inégalités, et négocier l'apport de financements spécifiques.
La composition des ressources des communes maliennes
Il est prévu que l'Etat malien finance certaines charges de fonctionnement. La Taxe régionale de développement devrait désormais rester au niveau local, (mais elle n'était plus perçue jusqu'à présent). Les communes disposeront également de ressources domaniales, et des ressources extérieures (coopération décentralisée).
Un Fonds local de développement est également en projet.
Les nouvelles communes auront surtout des difficultés à mobiliser des financements internes.
Le passage d'une planification descendante à une planification ascendante
Dans certains secteurs sensibles comme la santé, l'éducation et la justice, l'Etat malien gardera une politique de planification nationale, en concertation avec les communes.
Le nouveau dispositif institutionnel prévoit le schéma suivant :
Le changement de rôle des services déconcentrés de l'Etat
Les services déconcentrés de l'Etat passent d'un rôle de décision, à un rôle de conseil et d'orientation.
Les partenaires français ont un rôle à jouer, pour favoriser ce changement de fonction, en associant les services techniques, en les informant et en sollicitant leur appui pour les légitimer dans ce nouveau rôle.